- Y a-t-il des thèmes clefs, des messages ou des théories cachés dans votre travail ?
Je me méfie d 'une approche tautologique de l'art : "c 'est de l'art, parce que c'est de l'art", qui disqualifie toute critique et ne profite qu'à certains - En quoi c 'est de l'art ? - me semble plus honnête, avec la possibilité d' une évaluation qui sous-entend un sens commun et peut profiter à tout le monde. Etre primitif, penser que l'esprit est dans la matière, que l'amulette façonnée ou autre Grigri, le retient, l'enferme, et lui sert de véhicule, me va bien. Sans le travail de la forme, alliée à la matière, sans oublier un engagement réel, sincère, de la part l'artiste, il ne peut y avoir d'œuvre d'art, ou d' expression artistique. Au delà du clivage entre abstraction-figuration, c 'est "la mise en œuvre", la matière enfin façonnée avec une forte imprégnation dans l'espace, qui donne cette aura à l'œuvre d'art, et qualifie l'artiste. Le sens toujours suit.
- Pouvez-vous nous parler un peu de votre approche artistique ?
La représentation est inéluctable à mon sens en peinture, même s'il ne s'agit que de reflets comme dans la métaphore de Platon sur la parois d'un caverne. En effet, la frontalité du tableau, du plan-surface-peint-vertical, impose l' image, c' est une évidence, et la distinction entre abstraction et figuration n'est ni pertinente, ni juste.
C' est un pied dans le champs de la sculpture que j' aborde mon travail de peintre, cherchant à tendre un fil entre la représentation, pierre angulaire de la peinture, et la mise en œuvre d' un procédé, sans lequel rien n'arrive. Ce culte du procédé quand "la peinture ne représente qu'elle même", (d'après Gerhard Richter), donne une peinture élémentaire, voir primitive: tel geste, telle application, telle scarification de la peinture encore fluide sur la surface à peindre, va se saisir en un motif accidentel mais toujours expressif et convaincant, alors que la peinture se solidifie au séchage.
- Cependant vous faite aussi de la peinture figurative, comment pouvez-vous concilier les deux ?
Jérôme Hémain